- Project Runeberg -  Samlaren / Ny följd. Årgång 9. 1928 /
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(1880-1935)
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Full resolution (TIFF) - On this page / på denna sida - Torsten Eklund: Lettres de Stockholm par Auguste Strindberg

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142 Torsten Eklund

IV. LES THEATRES.

Que de fois a-t-on déclaré que le peuple suédois manque
d’e-sprit dramatique! Ils le répêtent eux-mêmes jusqu’à satiété dans
leurs œuvres critiques. En fait, je ne veux pa les contredire.

Comment voulez-vous qu’un rêveur par état puisse discerner
ses rêves de la réalité? Cest pour cela même que le Suédois,
in-capable de concevoir des caractêres, ne fait que chercher à
pré-parer des röles, taillés d’aprês les acteurs et les actrices. De plus,
pour empoigner le public, il est d’urgence d’avoir le heros
sympatin que et le milieu patriotique.

La specialité dramatique de la Suêde, c’est le drame
(Schauspiel). En voici 1’ordonnance. L’action se déroule aux temps passés,
ön n’aime pas les actualités. Le heros doit être, au moins un roi,
une reine ou quelque chose d’analogue. Un Dalécarlien, haut de
deux mêtres, est d’un effet inévitable pour le troisiême acte,
sur-tout en se servant de son patois. Un Danois, tout en rouge, doit
recevoir des coups de pieds au derriêre vers la fin du quatriême
acte.

Le clou reste toujours la femme abandonnée par le séducteur.
Le séducteur joue toujours un röle de premier ordre et la blonde
finit en regie par se venger. La vertu est haut cotée sur la scêne.
Des monologues s’allongeant en kilométres, des entremets de chants
populaires, une danse nationale, des cortêges en grande tenue, une
exécution au son des tambours désaccordés sont irrésistibles. Au cas
oü le heros est changé en heroine, le succés est garanti. Alors la
blonde ehasteté revet une cuirasse, écrase linfåme dans un monolo
gue foudroyant, et le pauvre homme, quelque fort qu’il soit,
dé-campe. Une panégyrique en faveur de la femme du Nord termine
le spectacle. Le maitre de ce genre de »charades sans actions» est
M. Frans Hedberg. Cest purement suédois, le plus suédois de tout
ce qu’il y a d’original en Suêde. Sensibleries, rêvasseries, rien que
cela. Des fantomes, des ombres chinoises, rien de moins et pas
davantage.

Lorsque ce rêveur s’avise de faire de la comédie, il révêle le
dualisme de son esprit. Germain de naissance, il a reçu depuis
un siêcle et plus une éducation française. A 1’epoque de Gustave
III (mört en 1792), toute la société de Stockholm avait adopté la

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