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Monsieur, qu’il faut toujours plaire si on veut s’assurer du
succés. Hereux qui possede ce grand talent comme Vous!
Je me prens la liberté de Vous envoyer une de mes Epitres
ä Monsieur le Comte de Douglas. Je Vous dis une de mes
Epitres; car elles ont été en grand nombre, et j’avois il y 5
a une année tous les soirs le plaisir de jetter au feu ce que
j’avois barbouillé, les aprésmidis ä 1’heure du Caffé. Celle-ci
est la derniere, et comme le sujet en est serieux, elle est
peutétre un peu mieux travaillée que la plupart des autres.
Cest n’est pourtant pas que je prétens quelle soit bonne; 10
Non Monsieur elle est tres faible; mais aussi il faut Vous
dire, qu’elle est agée plus qu’une année entiere.
Dans les pappiers qui accompagnent cette lettre, Vous
trouverés une Epitaphe, que je ne Vous presente, que
pars-quelle est imprimée et qu’elle est la seule qui m’aye jamais 15
rendu quelque chose de considerable. II faut Vous avouer
que le pauvre Msr, Palm m’a payé bien cher les louanges de
sa femme. Mais dites moi cordialement, ne trouvés Vous
pas qu’ils sont trés insipides ces louanges? Je Vous assure
que cette triste Epitaphe m’a degouté bien souvent de ma 20
Muse rustique, car verroit-on jamais rien de si sec? Mon
illustre Ami le Comte de Douglas me dit toujours que c’est
un catechisme en vers. II a raison: elle est absolument sans
genie. Les préceptes de la Theologie et celle de la
Philo-sophie Morale font presque toujours une figure miserable en 25
vers. II n’est méme pas tolerable de les mettre ä la tete de
ses poésies, comme on l’a fait chés Vous il n’y a pas longtems.
Les poémes de cette sorte, ou plutot toute sorte de poémes,
doivent étre d’un tour ingenieux, piquants, et pleins de tableaux
brillants: Ut Pictura poesis. Horace qui étoit si grand peintre 30
dans ses odes, ne se croit pas cela lui méme, dans plusieurs
de ses autres ouvrages; et cest pourquoi qu’au contraire
3. — Leopold. II.
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